L’histoire du projet débute en 2002 lorsque WED ( Wiener Entwicklungsgesellschaft für den Donauraum AG) lance un concours international pour l’aménagement de ce secteur au potentiel incroyable, sur la rive du Danube, en tête du pont reliant la Vienne historique à de nouveaux quartiers.
Le projet urbain proposé alors, envisage la création d’une véritable porte d’entrée pour la ville, favorisant la construction de programmes mixtes et la construction de deux nouvelles tours. Il ne s’agit pas de deux tours « célibataires », mais de deux bâtiments qui dialoguent. Les deux tours proposées forment en effet un ensemble, comme les deux moitiés séparées d’un monolithe. Orientées vers le fleuve, elles dialoguent à la fois avec la ville historique et la Vienne nouvelle. La silhouette de Donau-City est transformée par l’émergence de ces deux nouvelles « têtes ». Le volume du haut des tours, coupé en biais, désigne l’espace entre-deux, c’est-à-dire la Plaza, un passage d’entrée dans le quartier. La façade interne ouvrant sur la place est composée d’un jeu de plis de verre, évoquant les mouvements de la surface de l’eau du Danube. Cette façade crée un mouvement, une ondulation captant et réfléchissant la lumière comme un appareil d’optique ou les facettes d’un cristal taillé. Les trois autres façades planes constituent le cadre ou l’écrin de l’édifice, sertissant la façade sculptée et la mettant en exergue.
Planifiées ensemble, seul le chantier de la première tour débute en 2010. Après quatre années de chantier, la Dc Tower I devient la tour la plus haute d’Autriche. D’une hauteur de 250 mètres (220m + antenne), elle accueille sur ses 60 étages des espaces de bureaux, un hôtel et quelques commerces.
L’ensemble du projet s’accompagne d’un projet d’aménagement urbain et une analyse approfondie des connexions qui peuvent être établies entre le nouvel ensemble à édifier le long du Danube et les quartiers historiques bâtis sur l’autre rive du fleuve. L’arrivée en voiture est organisée autour d’un « patio » percé dans la dalle piétonne. Cette vaste ouverture conduit la lumière naturelle dans les parkings et les ventile naturellement. De larges escaliers permettent d’accéder au niveau de la Plaza.
L’aménagement de l’espace public est marqué par une forêt d’ombrelles en tissu métallique qui protège du soleil, mais joue également le rôle de brise-vent tout en donnant au lieu une échelle humaine.
Le chantier de la deuxième tour débutera fin 2020 pour une livraison prévue fin 2023.
Dominique Perrault
Inauguration de la DC Tower I , Février 2014
"La livraison d’un bâtiment est toujours un moment extrêmement émouvant pour l’architecte, moment qui marque le terme d’un long processus de médiations, depuis l’absolue virtualité des premières esquisses jusqu’au réglage in situ des derniers détails. Acteur, pour un temps, de l’incessante actualisation des territoires, l’architecte s’en va. Il transmet le relais à ceux pour qui il a œuvré. L’architecture passe alors d’un état intellectuel, conceptuel, à un état fondamentalement physique et réel.
A Vienne, ces sentiments sont amplifiés par le caractère iconique et l’extrême visibilité de la DC Tower 1, mais également par l’histoire qui me lie au projet. Une histoire qui débute il y a douze ans, en 2002, lorsque WED lance un concours international pour l’aménagement du dernier secteur de la Donau City, et dont l’écriture se poursuit.
A l’origine du projet, il y a un site au potentiel incroyable : un terrain libre, face à la Vienne impériale, rattaché à la géographie du Danube, installé sur le plateau de la rive orientale, en tête du pont reliant les deux Vienne. Il ne s’agit pas pour autant d’un site vierge, plusieurs projets y ont été pensés, il y a donc un déjà-là conceptuel, une virtualité tout à fait intéressante.
Très tôt, je me suis intéressé au rapport de cette tête de pont avec le reste du quartier de la Donau City, avec les berges du fleuve mais également aux conditions d’activation d’un espace public sur dalle. Nous avons alors profité de la commande pour dessiner une véritable porte d’entrée à la Donau City.
Contre les projets d’aménagement envisagés par le passé, WED prescrit un programme résolument mixte, condition indispensable au germe d’une urbanité contemporaine que nous proposons d’implanter dans deux tours.
Ces deux tours opèrent comme deux moitiés inégales d’un gigantesque monolithe qui aurait été fracturé, s’ouvrant pour faire arche avec des façades en mouvement animant le vide créé. Ce faisant, les tours sont légèrement orientées en direction du fleuve de façon à dialoguer avec le reste de la ville, à ne tourner le dos ni à la Vienne historique ni à la Vienne nouvelle.
Aujourd’hui, la première des deux tours est construite et le résultat est assez formidable, grâce notamment à une collaboration précieuse avec le bureau d’architecture Hoffmann-Janz. La plasticité de la façade pliée donne un sens de lecture à la skyline de la Donau City, désignant par ses ondulations le point d’entrée de la nouvelle polarité. Les plis contrastent avec la rigueur sage des trois autres façades et créent une certaine tension qui électrise l’espace public et le pied de tour.
Le plissement de la façade confère à la tour un caractère liquide, immatériel, une plasticité qui s’accommode à tout moment d’une lumière, d’un reflet, d’un événement. Avec Gaëlle Lauriot-Prévost, designer associée, nous avons cherché à ce que les espaces intérieurs de la tour soient, au contraire, très physiques, très présents. La structure ne se cache pas, elle ne se dérobe pas à l’œil. Le béton du squelette s’exhibe, se touche. La pierre et le métal, que l’on retrouve dans les halls et les circulations, participent à la carnation de la tour, à sa physicalité généreuse et rassurante.
La production architecturale contemporaine a tendance à masquer le travail véritable de l’architecte, celui de couture, de suture, de contextualisation et d’ancrage dans l’environnement du projet. Le design survient dans un second temps. Les tours apparaissent trop souvent hors-sol, comme des objets architecturaux, des objets en soi. Il faut les faire atterrir, les enraciner dans le sol des villes, là où se trouve la substance urbaine. Faire coïncider l’horizontalité fondamentale de la ville et de l’espace public avec les trajectoires verticales. Le travail sur le piètement, l’assise de la DC Tower 1, a été fondamental et passionnant. Des dispositifs architecturaux qualifient le rapport de la tour au sol. Sur la face arrière de la tour, l’espace public s’élève depuis le niveau sous dalle par des jeux d’emmarchement pour atteindre le sol de référence. Cette topographie lance la tour et crée une interface spatiale, accessible à tous, qui rend possible et acceptable la survenance d’un objet aussi physique. Sur les trois autres façades, des ombrelles métalliques s’élèvent progressivement du sol à mesure que l’on s’approche de la tour, atténuant la violence de l’éruption et mêlant la ville et ses mouvements au destin de la tour. Un important travail sur les franges du quartier reste à conduire afin de révéler les dispositions géographiques de ce paysage urbain et mobiliser davantage les rives du fleuve.
La ville de Vienne démontre avec cette première tour que l’émergence ponctuelle et maîtrisée d’immeubles de grande hauteur peut servir la fabrique de la ville et produire des constructions contemporaines mixtes, économiques et énergétiquement performantes, adaptées aux pratiques métropolitaines."
situation Donau-City, Vienne, Autriche
maîtrise d’ouvrage WED (Wiener Entwicklungsgesellschaft für den Donauraum AG)
maîtrise d’œuvre Dominique Perrault Architecture, Paris, France
architectes associés Hoffmann & Janz Architectes, Vienne, Autriche
bureaux d’études Perrault Projets (ingénierie architecturale), Bollinger & Grohmann, Gmeiner Haferl Zivilingenieure ZT GmbH (structure), Werner Sobek Ingenieure (façades), ZFG - Projekt (fluides), Dr Pfeiler GmbH (Bauphysik), TB Eipeldauer & Partner GmbH (électricité), AXIS, Ingenieursleistungen ZT GmbH (VRD), Wacker Ingenieure (étude des vents)
surface du site 11 000 m²
surface construite total 229 000 m²
surface construite (sur terrain) 90 400 m²
surface construite (souterrain) 45 500 m²
hauteur 250 m (220m + 30m antenne), 60 étages
volume construit (sur terrain ) 316 500 m³
volume construit (souterrain ) 183 500 m³
début des études d’exécution 2 002
début des travaux 2010
inauguration février 2014
programme Bureaux (40 000 m², 33 étages), Hôtel (quatre étoiles, 254 chambres), 16 logements (2400 m²), Sky bar, restaurants (57ème étage), parking souterrain (environ 254 places)